Engager les médias pour une Côte d’Ivoire sans fistule obstétricale d’ici à 2030
14 mai 2025
En Côte d’Ivoire, 74 000 femmes vivent avec la fistule obstétricale. Une campagne d’envergure vise son élimination d’ici à 2030.
À l’approche de la deuxième Conférence Sud-Sud sur la fistule obstétricale prévue à la mi-mai 2025, un petit-déjeuner de presse s’est tenu à Abidjan le 13 mai 2025, pour marquer le lancement officiel de la campagne régionale et nationale pour l’élimination de cette pathologie invalidante et stigmatisante. Organisé par le Ministère de la Femme, de la Famille et de l’Enfant et l’UNFPA, en collaboration avec le Ministère de la Santé, KOICA, le Rotary International et la faitière MS-Média, l’événement a mobilisé journalistes, experts et partenaires institutionnels pour sensibiliser l’opinion sur un enjeu de santé publique encore trop peu connu.
Une urgence sanitaire encore largement invisible
La fistule obstétricale résulte principalement d’accouchements prolongés et difficiles, en l’absence d’un accès rapide à une césarienne. Elle provoque des pertes incontrôlées d’urine et/ou de matières fécales, une forte détresse psychologique, et un isolement social durable. Appelée « maladie de la honte », elle est souvent la conséquence de grossesses précoces, de mariages d’enfants et d’un accès limité aux soins obstétricaux d’urgence. Selon l’Enquête Démographique et de Santé 2021, environ 74 000 femmes vivent actuellement avec cette affection en Côte d’Ivoire. Chaque année, ce sont près de 500 nouveaux cas qui viennent alourdir ce fardeau sanitaire et social, révélant une réalité encore largement invisible. Depuis 2012, les efforts conjoints du gouvernement et de ses partenaires ont permis à plus de 4 400 femmes d’être opérées et à 2 200 d’entre elles d’être réinsérées socio-économiquement. Des avancées notables, mais qui restent encore loin de répondre à l’ampleur du besoin.
« Mettre fin à la fistule obstétricale, c’est redonner aux femmes leur dignité, leur santé, leur voix. Aucun accouchement ne devrait condamner une femme à l’exclusion », a plaidé Dr Honorée Kouamé, Directrice du Programme national de lutte contre les violences basées sur le genre, au nom de la ministre de la Famille, de la Femme et de l’Enfant, Mme Nassénéba Touré.
Une campagne multisectorielle à fort impact
Déployée du 12 au 24 mai 2025, la campagne actuelle s’articulera autour de trois axes :
Une mission médicale régionale, mobilisant des spécialistes issus de 13 pays africains pour assurer des interventions gratuites en faveur de 150 femmes souffrant de la fistule obstétricale
Une conférence technique régionale prévue les 22 et 23 mai, dédiée au partage des bonnes pratiques en matière de prévention, de traitement et de réinsertion
Une campagne de sensibilisation communautaire et médiatique, destinée à briser le silence, combattre la stigmatisation, et encourager les femmes à se faire dépister et prendre en charge.
Une ambition forte de mobilisation de ressources
La campagne prévoit également une mobilisation financière ambitieuse jusqu’en décembre 2025, avec pour objectif de collecter un milliard de FCFA afin de traiter et réinsérer 1 000 femmes supplémentaires. Le coût moyen par bénéficiaire est estimé à 900 000 FCFA, couvrant les soins chirurgicaux, le suivi psychosocial, et la réinsertion économique. Différents formats de contribution ont été dévoilés lors du déjeuner de presse (packs bronze, argent, or, diamant), en parallèle de la préparation d’un téléthon, d’une tombola, d’un gala de bienfaisance, et d’activités communautaires dans plusieurs régions du pays.
« Cette campagne est un cri collectif d’indignation et d’action pour mettre fin à l’injustice que constitue la fistule obstétricale », a affirmé Mme Cécile Compaoré Zoungrana, Représentante résidente de l’UNFPA.
Les médias, alliés clés pour briser les tabous
Le déjeuner de presse a mis en lumière le rôle clé des médias dans la construction d’un discours social plus inclusif. En relayant les témoignages des femmes survivantes, en informant sur les causes et les solutions, les journalistes peuvent devenir des vecteurs de transformation sociale. « Chaque mot publié, chaque image diffusée peut restaurer la dignité d’une femme. Vous êtes nos premiers alliés », a insisté Mme Compaoré Zoungrana. Le Président du Conseil d’administration de MS-Média, M. Cissé Sindou, a exprimé l’engagement du secteur. « Nous sommes une presse citoyenne. Avec nos plumes, nos micros et nos outils, nous jouerons pleinement notre rôle dans ce noble combat ». La Directrice du Programme national de lutte contre les violences basées sur le genre a salué cette mobilisation. « Grâce à vous, les préjugés tomberont et l’espoir renaîtra dans les cœurs. »
Une vision commune pour un avenir sans fistule d’ici 2030
Alignée sur les Objectifs de Développement Durable (ODD) et dans la vision des autorités nationales, d’une nation inclusive, cette campagne reflète une approche intégrée qui combine soins médicaux, plaidoyer, autonomisation et mobilisation communautaire. « Nous avons besoin de mobiliser 75 milliards FCFA pour éliminer la fistule obstétricale d’ici à 2030 en Côte d’Ivoire », a conclu Représentante résidente de l’UNFPA.