"Je rêve de faire le meilleur gâteau du monde", Gueya et 92 jeunes filles vulnérables de Boundiali achèvent leur formation et aspirent à un nouveau départ dans la vie.
Trois jeunes filles vulnérables du nord du pays racontent leurs histoires après une formation civique et qualifiante appuyée par l'UNICEF.
Ce matin de fin septembre 2020, Gueya Sanogo, 15 ans, et ses 92 autres amies pensionnaires du Centre de Service Civique d’Action pour l’Emploi et le Développement (SCAED) de Guingreni dans la région de Boundiali (nord de la Côte d’Ivoire) sont particulièrement en joie. La raison, elles reçoivent ce jour leurs diplômes de fin de formation des mains du Secrétaire d’Etat chargé du service civique, M. Siaka Ouattara, après 3 mois d’une intense formation civique et qualifiante.
Au cours de ces 3 mois dans le centre dédié exclusivement aux jeunes filles vulnérables issues des régions du Poro, de la Bagoué et du Tchologo (au nord du pays), les 93 pensionnaires filles ont reçu une formation civique et citoyenne axeé sur les notions d’alphabétisation, santé communautaire, secourisme, compétences de vie et de changements de comportement, ainsi qu’une formation qualifiante afin de faciliter leur insertion socio-économique. Pour la majorité de ces jeunes filles, leurs vies n’ont pas été faciles au départ. Peu avant la fin de leur formation, trois d’entre elles racontent leurs histoires :
Ma vie a déjà positivement changé
Djeneba Doumouya 19 ans, mère d'un garçon de 14 mois a suivi une formation en pâtisserie : « J'ai été mariée très jeune et mon mari me battait fréquemment. Quand mon bébé avait trois mois, je ne pouvais plus supporter de rester avec un homme aussi violent, alors je suis retournée chez mes parents. Ce n’était pas facile, mais je n’avais pas le choix. Parce que j’ai abandonné l’école assez jeune, je ne pouvais pas trouver un emploi qui me permettrait de subvenir à mes besoins et à ceux de mon bébé. Quelqu'un a parlé à mon père du Centre de Service Civique et de la manière dont il était possible d'y apprendre un métier gratuitement pendant trois mois là-bas. Je n’ai pas hésité une seconde. Les participantes peuvent choisir entre différentes disciplines. J'ai choisi d'apprendre la pâtisserie et de devenir pâtissière, car c'est mon rêve depuis que je suis enfant. On m'a dit que je pouvais emmener mon bébé avec moi au centre, mais j'ai décidé de le laisser avec ma mère. Il me manque beaucoup, mais ce n’est que pour trois mois. Après cela, je deviendrai plus indépendante et je n'aurai plus besoin de dépendre d'un homme pour prendre soin de moi et de mon enfant. En très peu de temps depuis que je suis ici, j’ai déjà beaucoup appris. J'ai appris la cuisine et le respect. Je me sens très heureuse et très fière de moi. Ma vie a déjà positivement changé. »
Pendant que je suis les cours, une enseignante s’occupe de mon enfant à la maternelle du Centre
Bibata Ballo, 19 ans, mère de bébé Mata âgée 6 mois, a opté pour une formation en esthétique. « Comme mes parents n’avaient pas les moyens de payer mes études, j’ai dû abandonner l’école très jeune pour trouver du travail. Un homme de la ville a dit à mon père qu'il pouvait prendre soin de moi. J'ai été maltraitée et je suis tombée enceinte. C'était très dur pour moi. Un travailleur social m'a alors expliqué qu'il était possible d'apprendre un métier au Centre d'action pour le développement et il m'a assuré que je pouvais emmener mon bébé avec moi. Ainsi, pendant que je suis les cours, une enseignante s’occupe de mon enfant à la maternelle du Centre. Je me sens très bien ici et me suis même fait des amies. J'ai un endroit pour dormir et on est bien nourri. De plus, je peux réaliser mon rêve. J’ai choisi de suivre le programme de formation pour devenir esthéticienne. J'espère démarrer ma propre entreprise afin de pouvoir subvenir à mes besoins et à ceux de mon enfant. »
Mon rêve est de devenir indépendante pour subvenir à mes besoins et à ceux de ma famille et faire le meilleur gâteau du monde
Gueya Sanogo, 15 ans, formation en pâtisserie : « J’ai dû quitter mes sept frères et sœurs parce que mes parents n’avaient pas assez de ressources financières pour survivre. J’habitais avec un tuteur parce que mes parents étaient sans moyens. Ce n’était pas facile. J’ai trouvé mon chemin dans ce centre et je suis très heureuse de cette opportunité. J'avais un peu peur de venir, mais une fois sur place, je me suis immédiatement sentie à l'aise. Mes amis et moi rions beaucoup ensemble. Les premières choses que j'ai apprises ici ont été la discipline et le respect. J'ai choisi d'apprendre la pâtisserie, car j'adore cuisiner. Mon rêve est de devenir indépendante pour subvenir à mes besoins et à ceux de ma famille et faire le meilleur gâteau du monde ».
Avec l’appui de l’UNICEF financé par le Fonds des Nations Unies pour la Consolidation de la Paix (UNPBF) et le Ministère italien de l'Intérieur, le Centre de Service Civique de Guingreni offre une formation civique et professionnelle aux adolescentes et jeunes femmes entre 15 et 21 ans, en situation d’échec scolaire ou analphabètes, sans qualification et sans emplois. Objectif, réduire de manière significative la vulnérabilité sociale de ces jeunes filles en voie de marginalisation et leur garantir une insertion socio-professionnelle réussie. Pour ce groupe de jeunes filles, l’agro-distribution, la cuisine-pâtisserie et l’esthétique à base de produits locaux ont été les 3 filières de formation suivies. Afin d’assurer un meilleur encadrement de ces filles ou femmes mères, une crèche a été ouverte sur le centre sous la supervision d’éducatrices préscolaires. Quinze (15) enfants ont été accueillis dans la crèche du centre.
Après la formation au centre, les jeunes filles sont placées en stages pratiques de 4 mois auprès de maîtres artisans ou en entreprises ou directement installés en auto-emploi avec des kits fournis. L’ONG locale, Animation Rurale de Korhogo (ARK), partenaire sur ce projet, assurera un suivi de proximité des jeunes filles sous la supervision de l’Office du Service Civique national (OSCN) dont dépend le Centre de Service Civique de Guingreni.